Rome face à ses origines
En janvier dernier, nous vous parlions de la remise en cause par l’archéologie du mythe fondateur de Marseille. Mais cette science peut tout aussi bien alimenter les fantasmes d’un mythe originel ! À l’instar de sites comme Pompéi, le vieux Rome fournit perpétuellement des découvertes archéologiques liées à l’histoire de la civilisation romaine.
La dernière en date n’est pas des moindres puisqu’il s’agit d’un tombeau situé sous l’antique forum de la ville éternelle (sous l’ancien Capitole plus exactement). Ce sarcophage d’1m40 est situé à proximité d’une pierre circulaire (probablement un autel) et fut découvert le 21 février dernier.
Ce qui en fait sa particularité, c’est sa localisation. Dans les sources antiques telles que Livius, Plutarque ou encore Virgile, c’est à cet emplacement que se situerait le sépulcre érigé en l’honneur de Romulus, le mythique fondateur de la ville romaine, ce qui bien sûr alimentent les fantasmes sur ce présumé tombeau. Cet illustre personnage à qui l’on devrait la naissance de la ville de Rome est pourtant aujourd’hui remise en cause par la plupart des historiens, qui l’assimilent à un simple mythe.
Malgré l’engouement suscité par cette découverte, les archéologues responsables des fouilles restent prudents car aucune preuve scientifique autre que les auteurs antiques ne peut être réellement apportée.
une suggestion basée sur des sources antiques
Patrizia Fortini, propos rapportés par l’AFP
Patrizia Fortini évoque cette épineuse question mais souligne que tous les auteurs antiques présentent le sépulcre dans cette zone du Forum : « C’est seulement une suggestion basée sur des sources antiques qui, toutes, pour cette zone du Forum, évoquent la présence du sépulcre de Romulus«
Romulus ?
Certains d’entre vous se demandent peut-être qui peut bien être ce Romulus qui fait tant parler. La légende en version courte ? C’est parti !
L’histoire de Romulus est intimement liée à celle de son frère jumeau, Remus. Ils sont les fils d’une vestale (prêtresse du dieu Mars), elle-même fille d’un roi légendaire d’Albe-la-Longue bientôt détrôné par son frère. Ce dernier ordonna que l’on jette les deux nouveau-nés de sa nièce dans le Tibre afin d’éviter toute contestation de son pouvoir.
Problème : les jumeaux ne furent pas noyés mais laissés dans un panier au bord du fleuve. Livrés à eux-mêmes, la légende veut qu’ils aient été recueillis par une louve dans la grotte du Lupercal. Cette dernière les allaite jusqu’à ce qu’ils soient découverts par un berger nommé Faustulus.
Cette célébrissime légende fait partie intégrante du mythe fondateur de Rome et est encore ancré dans l’inconscient collectif romain de l’Antiquité à nos jours. Par exemple, elle apparaissait sur des pièces de monnaie encore dans les années 330. De nos jours, elle occupe une place centrale sur le logo de l’AS Roma, club de football de la capitale italienne.
Devenus adultes, les deux frères vengèrent leur grand-père en tuant l’usurpateur et en le rétablissant sur son trône. Désireux de fonder une nouvelle ville à l’emplacement du lieu où ils furent abandonnés, ils consultèrent chacun les auspices (un présage lié à l’observation du vol des vautours). Chacun se situèrent sur une colline de la future cité : Romulus observe douze vautours sur le Palatin tandis que Remus en observe huit sur l’Aventin.
Un conflit fratricide débuta alors à propos de la construction de la ville et sur la future gouvernance de cette dernière. Romulus délimite le pomerium (séparation sacrée entre la ville et son territoire), franchi par Remus en guise de provocation. Romulus, sur le coup de la colère, tue son propre frère. Pris de remords, il enterrera son frère sous les honneurs sur la colline de l’Aventin avant de devenir le premier roi de Rome.
Bien entendu, cette histoire possède différentes versions selon les auteurs mais tous s’accordent à dire que Romulus est bien le premier roi mythique de la ville. S’en suivront des épisodes célèbres comme l’enlèvement des Sabines et les guerres entre romains et étrusques, mais ça se sont d’autres histoires !
De par sa qualité, un sépulcre et des cérémonies religieuses étaient toujours dédiés à Romulus, sur cette zone du Forum romain, ce qui rend bien entendu cette découverte si intéressante.
Un Lascaux catalan ?
Dans le sud de la Catalogne, à l’Espuglia de Francoli, furent découvertes des gravures datées d’il y a 15 000 ans. Cela nous rapporte donc à la préhistoire, au Paléolithique pour être plus précis. Néanmoins, certaines sont plus récentes et remontent au Néolithique, laissant supposer une utilisation du lieu sur plusieurs centaines voire milliers d’années. Une centaine de gravures ont été découvertes mais les spécialistes estiment qu’il devait y en avoir un nombre beaucoup plus importants.
Près de la moitié représentent des animaux, l’autre moitié représentant des motifs et des symboles. Beaucoup ont été perdus à cause du temps mais aussi à cause de la main humaine. Cette grotte était en effet très fréquentée des randonneurs, qui y ont eux-mêmes laissé leurs graffitis mais dans le même temps dégradés les anciens.
L’IPHES (l’institut de paléontologie humaine de Catalogne) a réalisé une vidéo efficace présentant les gravures les plus remarquables présentes dans la grotte :
Découverte macabre à Gand
Dans le cadre d’une construction nouvelle, des fouilles archéologiques préventives sont systématiquement organisées. Elles sont souvent l’occasion d’y faire des découvertes remarquables… ou macabres. En effet, dans le but de construire un centre d’accueil touristique, des fouilles sont en cours à proximité de la cathédrale de Gand en Belgique et délivre un nombre incroyable d’ossements humains puisque la zone correspond à l’ancien grand cimetière de la ville.
Depuis 2019, plus de 800 squelettes et ossements furent exhumés du site. Rien d’étonnant pour un ancien cimetière, direz-vous… mais récemment une découverte fut effectuée. En effet, les archéologues ont mis au jour des murs dont la forme surprend plutôt désagréablement : il s’agit d’ossements.
Ils sont composés essentiellement d’os de tibias, de cuisses et parfois de crânes d’adultes. Ils ont été datés d’une période assez large s’étalant du XV° au XVIII° siècle. Selon les archéologues qui effectuent les fouilles, cette découverte est unique pour la Belgique.
Des recherches plus approfondies seront nécessaires afin de déterminer la raison exacte qui poussa les gens à bâtir ces murs d’ossements mais l’hypothèse la plus plausible à l’heure actuelle est le manque de place : ne voulant pas enlever les ossements (la foi chrétienne évoquant la résurrection des morts), les habitants de Gand ont commencé à les entasser pour en faire de véritables murs, redécouverts aujourd’hui.
Janiek de Gryse explique :
« Lors du nettoyage d’un cimetière, les squelettes ne peuvent pas simplement être jetés. Étant donné que les fidèles croyaient en une résurrection du corps, les os étaient considérés comme la partie la plus importante«
Effectivement, les ossements n’avaient pas été jetés puisqu’en 2020, ils étaient toujours en place. C’est tout pour aujourd’hui (et c’est déjà pas mal). Point teasing : La onzième actu débarquera au début du mois prochain mais les Flâneries vous retrouvent dans 15 jours pour un nouvel article thématisé.