Il y a des albums qui suintent la haine viscérale et Les 150 Passions Meutrières de Kickback restent indétrônables en la matière depuis 20 ans maintenant. Les six morceaux réussissent le tour de force de te défoncer la gueule tout en te donnant envie de casser des bouches à ton tour. Sorti en 2000 chez Hostile Records, label français créé en 1995 dont le nom résume assez bien l’esprit du skeud en question, le maxi du groupe de hardcore parisien est un autel érigé en l’honneur du stupre et de l’ultra-violence. Vise moi un peu cette cover.
Revenons quelques instants sur Hostile Records car un point important mérite d’être souligné. C’est un label de rap qui a sorti, entre autres, Rohff, Mafia K’1 Fry, IAM, Seth Gueko mais aussi Ärsenik. Ce n’est pas commun qu’un label estampillé hip-hop sorte un skeud aussi orienté musique extrême. Mais que ce soit dans le style ou dans l’attitude, rien ne différencie Kickback des groupes de rap de la même époque.
On le sait, l’art du graffiti est étroitement lié à l’histoire de la culture hip-hop et les membres de Kickback ont énormément traînés avec les gueurta de la capitale. Pour avoir relu quelques interviews données çà et là par le groupe, les mecs aimaient « traîner en bande, s’incruster en soirées et baiser des meufs ».
Pour la petite histoire, ils ont envoyé une maquette des 150 Passions Meutrières chez Victory Records, label indé originaire de Chicago spécialisé dans la scène hardcore qui a notamment sorti du Integrity dont l’immense Systems Overload de 1995. Integrity est d’ailleurs un groupe avec lequel on peut retrouver plusieurs similarités avec Kickback. Bref, avec Victory ça n’a pas fonctionné, niveau musique, ça allait mais c’est au niveau des paroles où ça a posé problème. Sans déconner. Voilà le genre de lyrics qu’on peut retrouver sur l’EP des parisiens avec, par exemple, le morceau « New Sadist » qui commence d’ailleurs avec un extrait audio du moyen-métrage Carne de Gaspar Noé sorti en 1991 (ci-dessous), ce dernier introduisant Seul contre tous, premier long-métrage du réalisateur italo-argentin, toujours avec le génial Philippe Nahon dans le rôle principal : « Il y a bien deux choses que je ne pourrai pas lui refuser… la première c’est un coup de trique… la deuxième c’est un coup de poing… » :
The use of violence with
Awesome strength
The brutal fuck with
Maximum Destruction
That’s yours
That body’s yours
The ultimate pleasure
It’s your nature
Your right to kill
She’ll die in pain
Buggerfuck the whore
Peel off her skin
Hammer her skull
And tear out her guts
Feel the power
And spill out your fuck
As you drink her blood
Oui, dans Kickback ça chante en anglais et j’ai eu la flemme de traduire. Sinon, il y a linguee. Le chanteur charge la mule niveau paroles et tous les morceaux sont directs à souhait ! Sauf l’instrumental éponyme qui évoque des influences post-hardcore dans sa construction. Ouais, c’est violent. En même temps, quand tu vois les remerciement présents sur le maxi (ci-dessous) et que tu connais les types mentionnés, t’es pas surpris plus que ça. Je te laisse taper les noms sur Google si tu ne les connais pas déjà.
Autre réjouissance présente sur Les 150 Passions Meurtrières (en même temps, je te l’ai dis dès le début, tout est dans le titre, faut pas s’étonner plus que ça du contenu) avec « Ruining The Show » :
No respect for human lives
Fuck your world, fuck your life
Human rejects, worthless debris
I stab your face with a rusty knife
Back again in this bitch
With this sick thoughts in my head
A recurent nightmare where this world turns red
8 millions ways to hurt you, I’ll take you out
Fistfucking your dream that’s what it’s all about
C’est d’ailleurs sur ce même morceau que figurent les seuls textes français de l’EP. Si on en croit la rumeur, Hostile, qui est donc un label rap, a bien voulu sortir le skeud de Kickback à condition qu’y figure un morceau de ce genre musical. Et c’est là qu’intervient Profecy. Graffeur, artiste peintre et rappeur, selon Wikipédia (ouais j’avoue, je connaissais pas le gars). Après quelques recherches sur le travail du gonze, son deuxième album Galactik sorti en 2009 compte parmi les invités Rockin’ Squat, fondateur du groupe culte Assassin. Fort. Et niveau texte, et bien on sent que le gars est pote avec Kickback. En effet, Pro traînait lui aussi dans une bande que côtoyait les gars de Kickback et c’est en voyant le clip du morceau « I Need Drugs » de Necro où on peut voir l’oncle de ce dernier en train de fumer du crack que Kickback aurait demandé à Profecy d’écrire un texte dans cet esprit là.
Ci-dessous, la contribution rappée de Pro.
Pour les beaufs et les faux !
Une fois de plus, une fois de trop !
Kickback pro,
on enterre les rivaux !
Détesté par le monde entier,
le nez pourri par la C,
j’arrive dans c’monde d’enculé
où des capotes ont craqué
dans des chattes contaminées,
syndrome HIV, achevé.
J’bouffe de la merde,
j’vis dans la merde,
j’nique de la merde,
année 2000 c’est la merde.
MERDE !
Pendant que les trav’ sucent des pines,
ça snife la kétamine,
misogyne comme J. Gillis,
ton fion on l’extermine, sous cocaïne,
à deux, à trois, ton intimité on la ruine.
On te baise gratuit, ta soeur, ta fille aussi.
Cru et hardcore, je privilégie les drogues aux sports.
Sans respect pour l’espèce humaine,
toute l’année abreuvé de pensées malsaines,
150 passions meurtrières qui me harcèlent!
On retrouve aussi à la fin du dernier morceau « Murder Minded » un glauque interlude dont je n’ai pas réussi à trouver la provenance mais qui semble tout droit sorti d’une vidéo Jacquie et Michel bien misogyne (« doux » euphémisme) en anglais où on peut entendre les cris de douleur d’une femme et un homme (tout en décontraction d’ailleurs) balançant un sardonique : « Oh, oh it hurts, it hurts, it hurts, yes it hurts. Of course it hurts, it’s supposed to hurt you fuckin’ pig! It’s supposed to hurt, it’s supposed to hurt, that’s the idea. What do you think is a fuckin’ fuck movie?! It’s supposed to hurt. Right?! That’s what we’re doin’ here! It’s supposed to hurt. Get on your fours like a fuckin’ dog! ». (Du moins, c’est ce que j’ai arrivé à comprendre.)
Et à l’image de l’extrait audio en anglais bien craspouille en fin de morceau, Kickback vomit. Kickback nous dégueule à la tronche des textes qui puent le vice dans un « negative hardcore » de haute volée. En témoignent les nombreux conflits avec le public en live. D’ailleurs, va checker sur YouTube des vidéos de concerts du groupe, c’est la grosse branlée. Oui, Les 150 Passions Meurtrières font mal. C’est le but. C’est supposé faire mal. Kickback régurgite son mépris d’une humanité se complaisant toute entière dans la fange. Kickback est antisocial. Kickback est obsédé. Kickback est LE groupe de la scène hardcore hexagonale. « Cocorico » le gars…