À en voir leurs réactions, certains oublient leurs propres responsabilités dans ce drame humain qui dure depuis des années déjà. Juste après la catastrophe, Boris Johnson s’est dit « choqué, révolté et profondément attristé » par la nouvelle. Comme si ce n’était pas lui qui avait transmis à la France une enveloppe à huit chiffres pour « sécuriser » la frontière, plutôt que de venir directement en aide aux exilés en investissant cette somme dans leur accueil. Ses homologues Français, Jean Castex et Gérald Darmanin ont également parlé de « tragédie ». Comme si leur politique vis-à-vis des personnes exilées était un exemple, elles qui sont délogées, maltraitées et dépouillées du peu de biens qui leur reste sur les camps de fortune de Calais par les forces de l’ordre et donc de surcroit par l’Etat.
Autopsie d’une situation jamais prise par le bon bout
Il n’y a pas besoin de chercher bien loin pour savoir ce qu’il ne fonctionne pas dans la politique migratoire des deux pays. La simple lecture des réactions des décisionnaires britanniques et français suffit. Boris Johnson renvoie la balle à la France : « Nous avons eu des difficultés à persuader certains de nos partenaires, en particulier les Français, d’agir à la hauteur de la situation, mais je comprends les difficultés auxquelles tous les pays sont confrontés et ce que nous voulons maintenant, c’est faire plus ensemble ». Pour Gérald Darmanin, le seul problème vient des passeurs : « La responsabilité de ce drame est avant tout celle des passeurs, qui mettent en danger la vie d’hommes, de femmes et d’enfants sans aucun scrupule. Nos policiers et nos gendarmes sont mobilisés au quotidien pour lutter contre ces criminels. » Comme si des voies légales et sûres étaient créées par les deux pays pour accueillir l’afflux d’exilés, évitant donc la création de réseaux de passeurs profitant de ce système. Il semble bon de rappeler que les exilés qui ont perdu la vie ce mercredi n’auraient pas pris le risque de traverser la Manche dans une embarcation de fortune s’ils avaient le choix. Mais de quel choix parle-t-on ? Celui de rentrer dans un pays en guerre, où ils risquent leur vie à tout moment ? Celui de rester à Calais, où on ne leur laisse même pas le droit de dormir dans une tente et ce même quand les températures sont négatives ?
Il est grand temps que les choses changent et que les personnes au pouvoir se demandent enfin ce qu’elles feraient à la place de ces hommes, femmes et enfants que l’on ne traite pas comme tels.
En attendant, toutes nos pensées vont aux familles des disparus ainsi qu’à leurs proches et aux associations qui oeuvrent tous les jours pour rendre le quotidien des exilés un peu plus humain.