Le « Museu nacional d’Art de Catalunya » et ses collections

Pour la petite histoire, le MNAC de Barcelone a été fondé en 1990 lors de la fusion des collections des deux principaux musées de la ville, à savoir le Musée d’Art Moderne et le Musée d’Art de Catalogne. Ces deux institutions existaient respectivement depuis 1945 et 1934. La réunion de ces deux fonds avait pour objectif de permettre une meilleure conservation et une meilleure mise en valeur des œuvres.

Le musée se dresse aujourd’hui sur la colline de Montjuic, dans un édifice remarquable construit en 1929 à l’occasion de l’Exposition Internationale de Barcelone, nommé Palais National (Palau Nacional).

Le Palau Nacional qui abrite le MNAC © barcelona-tourist-guide.com

En termes de collections, le MNAC regroupe tout un ensemble de peintures murales d’art roman. La collection est très enrichie et remonte parfois à l’époque wisigothique de la Catalogne. Le musée regroupe également des œuvres d’art gothique, arrivant chronologiquement juste après l’art roman, mais beaucoup plus tardif dans la région catalane. Les œuvres sont datées de la fin du XIII° au milieu XV° siècle.

Et puisqu’on a l’air partis sur une bonne vieille chronologie, viennent ensuite les œuvres de type Renaissance et Baroque (XV°-XVIII° siècle) avant d’arriver sur les époques modernes et contemporaines. Au total, sur l’ensemble des collections, le MNAC regroupe près de 250 000 œuvres, ce qui en fait un très vaste musée, même en ne tenant pas compte des expositions temporaires et des actions « hors-les-murs ».

En termes d’organisation, le musée se répartit sur deux étages, le rez-de-chaussée concerne la partie médiévale-Renaissance tandis qu’au-dessus sont exposées les œuvres modernes et contemporaines ainsi que la collection de numismatique (les pièces de monnaie) du musée.

J’ai pu observer la muséographie du MNAC et la comparer aux éléments vus durant ma formation patrimoniale.

La scénographie

Dans une optique de démocratisation de la culture et notamment des musées, les scénographes et les régisseurs d’œuvres tentent de mettre en avant le public et son expérience de visite en tant que loisirs tout en l’intégrant dans un processus pédagogique. Décors immersifs, outils numériques, jeux pour enfants : tout est bon pour faire du musée un lieu de loisir. Cependant, cela n’a pas toujours été le cas et les vieux musées sont ceux qui sont sans doute le plus difficiles à restructurer. Qu’en est-il du MNAC ?

Si le choix est laissé aux visiteurs, on commence le plus couramment par les œuvres les plus vieilles du musées, à savoir la collection d’art roman. Et là, force est de constater que c’est très bon en termes d’immersion ! La plupart des œuvres d’art roman (et certaines gothiques) sont des peintures murales. Là où certains musées se seraient contentés de les exposer de façon brute, le MNAC prit le parti de reproduire les formes des bâtiments dans lesquels elles se trouvaient. La plupart des peintures sont extraites d’édifices religieux fouillés, désaffectés ou menacés de destruction. Elles ont ainsi été sauvées. Les œuvres sont exposées dans leur jus (reproduction d’absides de chapelles, de coupoles ou de pans de murs) pour offrir aux visiteurs l’impression de visiter l’église. Assez remarquable.

Le reste des collections est exposé de façon très classique, typique d’un musée traditionnel avec un petit cartel expliquant chaque tableau, peinture, statuette, etc… En revanche, ce musée est très pauvre en termes de numérique (quelques vidéos disposées sur l’ensemble des collections) malgré sa taille conséquente. Le MNAC pallie toutefois ce problème via un système d’audioguides accompagnés de tablettes qui permettent de mieux cerner l’œuvre et son artiste.

Une scénographie assez monocorde est un risque : le spectateur peut se lasser rapidement car le musée est très vaste. La durée de ma visite fut d’environ 4h30. Tout faire en une seule journée est donc difficile. La présence d’un petit café dans l’auditorium du musée permet aussi de mettre en avant le musée comme un lieu de détente. On peut y faire une pause entre deux visites, c’est très agréable.

Heureusement, la qualité des œuvres présentées est remarquable et certaines œuvres ne passent pas inaperçues comme le tableau de la Bataille de Tétouan, un tableau peint par le peintre catalan Mariano Fortuny entre 1862 et 1864 qui possède des dimensions assez impressionnantes (300 × 972 cm).

La bataille de Tétouan, de Mariano Fortuny (1862-1864). On notera la qualité de mon cadrage

Et les autres publics ?

Si techniquement on ne devrait pas avoir à le faire remarquer, le musée est entièrement accessible pour les personnes à mobilité réduite. Des actions aussi simples que faciliter l’accès à un public en situation de handicap font aussi partie de cette démocratisation de la culture, appuyée par une législation de plus en plus incitative. Cela est nécessaire car aujourd’hui encore beaucoup de musées ne possèdent pas ce genre d’installation.

Du côté des jeunes, la scénographie n’est pas très engageante pour les moins de dix ans. Néanmoins sur certains cartels, un jeu d’énigmes est indiqué. Vraisemblablement, le jeu est lié aux tablettes prêtées avec l’audioguide permettant de résoudre une série d’énigmes sur les collections du musées. Ceci permettant bien entendu d’enrichir l’exposition classique, très longue, qui finirait par lasser de très nombreux enfants. Outre ce petit jeu, il faut noter que de nombreuses activités sont organisées toute l’année à destination de tous les publics (des plus jeunes aux adultes). Le but est, comme je le disais en introduction de ce paragraphe, de faire du musée un lieu éducatif mais aussi de loisirs.

Côté pratique

La pratique du musée, c’est-à-dire comment les œuvres vont être perçues par le public, doit aussi être prise en compte. Au sein du MNAC, à chaque entrée de collections se trouvent un grand panneau explicatif sur les salles à venir. Certaines salles au sein d’une même collection possèdent leurs propres caractéristiques développées dans un petit panneau qui leur est dédié. Quant aux œuvres, de petits cartels individuels sont apposés en général à proximité de ces dernières pour les identifier (date, auteur, type, etc…).

On détermine assez facilement que le musée a recueilli certaines collections plus tardivement que d’autres car la scénographie change régulièrement, tout comme les langues utilisées. Le français par exemple est une langue aléatoire, présente au tout début de l’exposition puis absente (ou partiellement absente) jusqu’aux collections de l’époque moderne. Pour les collections situées à l’étage, le français est en revanche beaucoup plus employé car les panneaux ont sans doute été conçus plus récemment.

Bon vous me direz, techniquement, les français font de l’anglais ou de l’espagnol dans leur cursus scolaire, ce qui devrait leur permettre de réussir à se débrouiller… mais bon, je pense que nous connaissons tous le niveau légendaire des français en langues étrangères. Encore une fois, l’audioguide peut aider de ce côté-là.

« ¿Por qué solo hay catalán?

Ironiquement, les visiteurs français et asiatiques (entre autres) ne sont pas les seuls à expérimenter de nouvelles langues. Les espagnols semblent aussi en difficulté ! En effet, la langue catalane est la première utilisée dans ce musée, aux côtés de l’espagnol et de l’anglais. Parfois, les petits cartels explicatifs ne sont écrits qu’en catalan, au grand dam des visiteurs espagnols. J’ai eu involontairement l’occasion d’entendre un couple proche de moi, dont la femme demandait à son époux « ¿Por qué solo hay catalán? » et ce dernier de lui répondre que ce n’était pas normal. Ce petit échange peut faire sourire mais rappelle bien évidemment que les relations entre la Catalogne et Madrid n’ont jamais été aussi tendues que ces derniers années.

Physiquement parlant, un musée est parfois fatigant lorsqu’il nous oblige à garder la position debout constamment. C’est pourquoi beaucoup de musées permettent aux visiteurs de s’asseoir par la présence de bancs dans les salles. Le visiteur peut ainsi contempler les œuvres assis sans avoir à se déplacer. Au sein du MNAC, certaines salles comportent ce type de sièges et c’est une chose très bien venue. On aimerait d’ailleurs qu’il y en ait plus car certaines salles n’en possèdent pas.

Une salle sans banc, situé en milieu de visite

Enfin, certains cartels sont idéalement situés pour la lecture (à hauteur des yeux du visiteur qui n’a pas à se baisser et donc à se fatiguer) mais certains ne le sont pas (trop bas et écrit trop petits).

Et bien voilà, c’est le moment de distribuer les points ! On a aimé :

  • La très bonne reproduction des églises romanes pour mieux valoriser les peintures
  • La qualité des œuvres exposées et la bonne conservation de ces dernières
  • La qualité de l’audioguide, quasiment indispensable pour ce musée
  • L’organisation de multiples ateliers pour enfants et adultes tout au long de l’année
  • La présence d’un café pour moderniser le musée et en faire un lieu de détente

On n’a moins aimé :

  • L’irrégularité des langues des textes explicatifs
  • Le manque d’outils numériques (hors audioguide) qui permettent aux visiteurs d’établir un contact avec les œuvres
  • La scénographie un peu trop classique d’une partie des expositions

Le MNAC reste donc un très bon musée, intéressant par la richesse de ses collections et ses thématiques diversifiées, de l’art religieux médiéval à l’art mobilier contemporain de Gaudi (le célèbre architecte catalan, concepteur entre autres de la Sagrada Familia). Si vous visitez un jour la ville de Barcelone, ce musée est à ajouter sur votre Todo list !