Diffuseur historique de la Ligue 1 depuis 1984, la chaîne cryptée n’a pas pu s’aligner sur les offres de beINSPORTS et Mediapro. Ce dernier, principal acheteur, diffusera 8 des 10 rencontres de championnat chaque week-end dont les 10 principales affiches de la saison. Le groupe catalan marque un grand coup pour son arrivée dans les négociations. Reste à savoir s’il sera en mesure d’assumer le contrat, ce qu’il n’avait pas su réaliser en Italie après avoir acquis les droits de la Série A…

1,153 milliard d’euros 

Le montant annuel des droits tv pour 2020-2024. 

En hausse de 60% par rapport au précédent contrat, ce n’est pas une augmentation mais une véritable explosion que vont connaitre les droits tv dès la saison prochaine. En effet, pour s’attribuer les lots 1, 2, 4, puis 5 et 7 dans un second temps, Mediapro a posé 780 millions d’euros sur la table. beINSPORTS a déboursé 330 millions d’euros pour le troisième lot. La surprise est venue de Free qui s’est adjugé les droits VOD (lot 6) pour 50 millions d’euros. L’entreprise fondée par Xavier Niel entend proposer un contenu décalé à destination de la jeunesse.  

La revanche de Canal +

Mais le groupe français, dirigé par Maxime Saada, n’avait pas dit son dernier mot. Début décembre, il rachetait ainsi les lots attribués à beINSPORT. Il conservera donc deux matchs sur son antenne (samedi 21h et dimanche 17h). De son côté, la chaîne qatarie apparaît comme la grande perdante. Elle ne disposera que des deux premiers choix pour chaque journée de Ligue 2. Le reste ayant aussi été raflé par Mediapro.

Les deux principaux diffuseurs des dernières années n’ont pourtant pas tout perdu. Fin 2019, ils ont obtenu les droits de la Ligue des Champions contre un chèque de 375 millions d’euros. 60 millions de plus que le précédent contrat passé avec RMC Sport. Canal + disposera des deux meilleures affiches. beINSPORTS diffusera l’intégralité des autres rencontres. La finale sera quant à elle disponible en clair sur TF1. Mediapro, dont le président Jaume Roures s’est senti lésé, devra partager la diffusion de l’Europa League avec Canal +. Celui-ci souhaiterait alors racheter les droits de RMC pour la saison à venir. La bataille des chéquiers n’est pas près de se terminée.

Une aubaine pour la Ligue 1

Jusqu’alors, la Ligue 1 accusait un sérieux retard vis-à-vis des championnats étrangers où le montant des droits tv annuels approchait déjà le milliard d’euros, voir les deux milliards en Premier League. Mais l’arrivée récente d’investisseurs à Marseille ou Lille ainsi que la notoriété des stars parisiennes ont ouvert de nouvelles perspectives pour la « Ligue des talents ». C’est pourquoi Didier Quillot, fraîchement nommé directeur exécutif de la LFP, s’est tâché de mettre au point l’appel d’offre le plus prolifique de l’histoire du championnat.

Il fallait l’élaborer de la manière la plus complexe possible pour créer la plus grande émulation entre les enchérisseurs. On voulait le rendre anxiogène pour inciter les participants à payer le plus possible. 

Didier Quillot, directeur exécutif de la LFP

Une méthode efficace donc, même si les GAFA, dont il attendait des offres, ne se sont pas manifestés. L’objectif était clair : vendre chère, très chère, quitte à bouleverser les habitudes. Les droits tv représentant la principale rentrée financière des clubs, seul une augmentation significative permettra au championnat de lutter avec les autres à armes égales.

Le montant des droits a donc doublé en moins d’une décennie. Les principaux concernés, les clubs, s’en frottent les mains, un jackpot de 400 millions supplémentaires à se partager…  Cette saison représente alors un tournent, que ce soit pour les clubs de l’élite ou ceux qui souhaitent y accéder. Une bonne place acquise fin mai pourrait garantir une nette augmentation du budget. Pour les institutions aux potentiels financiers raisonnables évidemment…

Ce nouvel appel d’offre a poussé les dirigeants des clubs de Ligue 1 à se réunir en décembre pour évoquer la future répartition. Parmi eux, seize (à l’exception du PSG, de l’OL, de l’OM et de Nice) se sont accordés pour une distribution plus égalitaire des gains, prévoyant notamment un partage équitable des 400 millions supplémentaires, soit 20 millions pour chaque club à la fin de la saison. Seize clubs qui suffisent, selon le règlement de la Ligue, à ordonner ce type de résolution…

crédits Léquipe.

Les petits seraient-il enfin en position de force ? Nul doute qu’ils n’en ont jamais été aussi proche ces dernières années… Au grand dam de la LFP dont la politique semble vouée à grillager le championnat. L’instauration du barrage d’accession à la Ligue 1 en témoigne. A l’instar de la justice à deux vitesses entretenue par la DNCG. Et, en observant ces même droits tv du côté de la Ligue 2, le constat est brutal : les clubs se partageront une enveloppe totale de 64 millions d’euros. On est bien loin du magot réservé aux puissants. Un fossé qui pourrait rapidement mener à une division fermée en France.

Et les abonnés dans tout ça ?

Ah il est bien loin le temps du décodeur Canal + ! Celui des matchs à la demande, de l’Equipe du dimanche, de Biétry et de Gilardi…

De TPS, Orange, beIN à Mediapro donc, ils sont nombreux à avoir contesté les droits tv à la chaîne cryptée. Peu importe ce qu’il en coûtera aux abonnés ! Alors, l’année prochaine il vous faudra encore de multiples abonnements si vous souhaitez suivre votre équipe tout les week-ends. Sans parler des joutes européennes, encore sous l’égide de RMC pour une saison.

crédits Mediasportif

Médiapro devrait commercialiser son offre aux alentours de 25 euros/mois. Ajoutez à cela l’abonnement à Canal + avec l’offre beINSPORTS et vous vous retrouverez à lâcher un billet vert pour des Amiens-Metz. Le consommateur devra inévitablement payer le prix de cet appel d’offre. Ou il faudra faire des choix, quitte à manquer des rencontres. D’autant plus que ces groupes entendent lutter contre le streaming illégal qui ne cesse de faire des émules. Il serait d’ailleurs temps de songer aux plateformes de streaming légales pay per view. Un système largement développé outre Atlantique qui permet au consommateur d’acheter simplement la rencontre qu’il souhaite regarder.

Pour l’heure, l’organisation exacte de ces abonnements restent encore à définir mais après s’être livrés à de rudes négociations, on imagine difficilement ces géants de l’audiovisuel faire des concessions. Alors pour l’instant, profitez du rectangle vert sur vos écrans tant que vous en avez la possibilité. Ce soir par exemple, devant Arsenal-Olympiakos en Europa League, et en clair s’il vous plait !