Le téléphone sonne. C’est la deuxième fois en une demi-heure. Seule la sonnerie vient troubler la quiétude des lieux, restés trop longtemps fermés. L’entrée, le bar, les scènes, les coulisses…désespérément vide. Les banderoles sur la devanture sont les seuls signes de vie et témoignent de l’occupation des lieux par les intermittents du spectacle.
Une tête dépasse tout de même de la billetterie. C’est celle de Cassandre Lafay, chargée d’accueil, qui répond aux appels. « Nous avons mis en place une permanence téléphonique pour les remboursements et les annulations. Ce sont pas mal de questions et de demandes sur ce qui va se passer et comment ils peuvent se faire rembourser », explique la jeune femme qui s’occupe du lien sur les points de vente.
Cette permanence, qui se joue également par mail, a permis de rassurer les spectateurs et de conserver un lien avec eux malgré la fermeture. « Les gens gardent quand même leur place parfois sur cinq dates reportées. C’est assez chouette, car cela veut dire qu’il y a une belle loyauté envers la salle et les artistes » s’enthousiasme Cassandre.
Une autre personne est présente dans cette immense salle de spectacle. Il s’agit de Ludovic Seguin, permanent responsable du bar et de l’animation du club mais aussi référent avec les intermittents qui occupent l’espace. Ces derniers font partie du Collectif Intermittent.e.s et Précaires de la Loire (CIP 42) et du comité CGT des privés d’emploi et précaires (CTPEP).
« Une des revendications des intermittents qui sont présents ici et dans plusieurs lieux en France, c’est l’abandon de l’assurance-chômage pour le régime général. Cela concerne tout le monde, tous les travailleurs en France. C’est l’un des sujets sur lequel ils travaillent depuis la mobilisation », précise Ludovic.
La salle n’attend plus que son public
À partir du 19 mai, le Fil reprendra sa fonction première : celle d’apporter du divertissement et du baume au cœur des spectateurs.
Dans une entrée habituellement noire de monde, Cassandre est pour l’instant bien seule. Au téléphone de la billetterie, elle répond aux interrogations sur la réouverture le 19 mai. « Nous serons sur une jauge réduite. Comparée à celle de 1 200 personnes, habituellement, c’est sûr que ça change, mais nous avons déjà eu des dates en octobre avec des restrictions et un public assis donc nous sommes préparés. »
La salle est dotée d’un gradin pour le public assis ainsi que d’une jauge dite « cabaret » avec des petites tables et des tabourets. « A ce stade, il vaut mieux ouvrir dans ces conditions réduites que ne pas ouvrir du tout. Cela fait trop longtemps qu’on est fermé », déplore Cassandre.
Cela fait un an que l’équipe s’organise sur les reports et les annulations. « Nous sommes en train de mettre en place des possibilités d’accueil pour des concerts qui auront lieu en juin. Sachant que la saison pour nous s’arrête début juillet, ce sera très rapide », note Ludovic.
L’occupation continue au théâtre de l’Odéon où a commencé la mobilisation du secteur culturel, malgré la réouverture le 19 mai. Au Fil, les portes vont s’ouvrir à nouveau au public, dans le respect du protocole de déconfinement annoncé par le gouvernement.
Ludovic a des attentes pour le futur à la veille de cette reprise partielle d’activité : « Je souhaiterais la pérennisation du statut d’intermittence dans la forme où tous les différents métiers puissent faire un statut sur l’année 2021-2022. Qu’on continue à parler d’eux quand on rouvrira. »