Ah, vous êtes là. Bien. Je crois qu’il est temps que je me présente un peu. Non, c’est vrai quoi, ça fait déjà quelques semaines que vous lisez des mots qui font des phrases sans même vous inquiéter de l’identité de l’auteur. J’aurais pu être n’importe qui, imaginez. J’aurais pu être corrézien ou pire, j’aurais pu être Lionel Jospin revenant d’entre les morts. Comment ? Il est pas décédé ? Merde, vraiment ? Faudrait peut-être commencer à s’inquiéter un peu quand même non ? On a des nouvelles ? Mince. Attendez, on me fait savoir à l’instant qu’on s’en fout pas mal. Et c’est pas faux. Déso Lionel.
Bon, qu’est-ce que je disais avant de m’interrompre ? Ah, oui, parlons de moi. Quant à savoir si je suis en train de satisfaire un fantasme mégalomane, je laisserai cette interrogation en suspens, vous vous ferez votre avis. D’ailleurs, pour ceux qui râlent déjà, je vous rappelle qu’on me laisse écrire ici. Envoyez donc vos plaintes à la rédaction, on les fait suivre à Henri Dès. Il m’a pourri mon enfance avec ses chansons, il ne l’a pas volé. C’est d’ailleurs bien connu, les auteurs sont irresponsables. Tenez, une fois, on m’a confié un éléphant et un magasin de porcelaine, je vous explique pas le boxon.
Premier point, donc, je suis irresponsable.
Prenez des notes, je répèterai pas.
Bon, je vous sais perspicaces. Pas tous hein. Mais certains. Je vous sais perspicaces, donc, ce qui me fait penser qu’une question doit vous tarauder. Ça vous taraude hein ? Oulah, qu’est-ce que ça taraude. Pas d’inquiétude, je vous ai compris. Vous vous dites « euh, dis, la photo là, t’en a pas encore parlé, tu serais pas un peu en train de nous la faire à l’envers ? »
Si. Complètement.
Deuxième point donc, je suis un escroc.
Et pour ceux qui insisteraient pour que j’en parle, sachez que du haut de ce quai de métro 23 minutes de trajet entre Bastille et Chatelet vous contemplent. Alors, pour paraphraser un agaçant pseudo philosophe dans ses gesticulations insupportables : « Pouet pouet ! Laissez-moi parler ».
Troisième point, et gueulez pas tout de suite je vais développer, je suis un artiste. Attention. J’entends par là la définition communément admise de l’artiste. C’est-à-dire que je me lève entre 16 et 19 heures le matin, je suis alcoolique, je me demande un jour sur deux si je devrais pas m’amputer l’oreille gauche et le reste du temps si c’est pas la droite qu’il faut couper en fait, je ne laisse pas ma place aux vieilles dames dans le bus, je me prends tous les desserts aux buffets à volonté et je travaille depuis des années sur un chef d’œuvre qui devrait me révéler au monde d’ici 50 à 70 ans. Je dirais par ailleurs que le plus difficile dans cette vocation, contrairement à ce qu’on pense généralement, ce n’est pas l’imagination, mais la rigueur. Combien de fois croyez-vous que l’envie m’a prise de prendre une douche, de laisser un pourboire ou de m’habiller pour sortir les poubelles ? Heureusement que la voix de la raison, si dure soit-elle, me rappelle toujours au droit chemin.
Quatrième et dernier point (je sens que vous fatiguez). Point Bonus. J’aime les pommes.
Oui. Je suis humain, malgré tout. Vous savez que sans les pommes on serait bien dans la merde hein. Newton aurait pas inventé la gravité avec une tomate. On flotterait juste dans l’espace comme des cons. On aurait même pas de métro pour faire Bastille-Chatelet en 23 minutes. On y pense pas assez. C’est bien dommage.
C’est bien, les pommes.