Henri, que vous voyez ici, ne manque pas de majesté. Il ne manque pas non plus de charisme, il en a même un peu marre d’être le symbole de tous les pays qui se croient meilleurs que les autres. Mais ce n’est pas forcément une considération qui le préoccupe au quotidien. Non, Henri a des problèmes un peu plus importants en ce moment. Voyez-vous, il a perdu ses lunettes. Henri est myope comme une taupe. Il porte des lentilles pour les photos, mais après ça lui irrite les yeux. Il est assez sensible. Alors il porte des lunettes.

Je vous entends vous moquer. « Oh l’autre eh, quel blaireau ». Et ben c’est pas gentil. Soyez gentils s’il vous plait. C’est mieux quand tout le monde il est gentil.

Donc, Henri a paumé ses lunettes. Le con. Il chassait tranquillement, avait repéré un petit groupe de couillons à poil ras, une espèce de rongeur aux dents trop longues qui a rapidement tendance à proliférer. On en croise notamment dans les zones résidentielles et les quartiers d’affaire. Mais pendant les vacances, nombre d’entre eux migrent vers des destinations exotiques à la recherche de sensations fortes. Ayant repéré l’aubaine donc, Henri prenait de la hauteur, tout allait bien. Il avait le choix de sa proie, les couillons se réunissent souvent en troupeaux, vous pouvez d’ailleurs les appâter avec une machine à café, c’est très facile. Mais au moment de s’élancer dans un vol piqué vertigineux, boum ! Un Airbus A320. En plein dans sa mouille ! Et c’est là qu’il a perdu ses lunettes.

Un peu désorienté, et après avoir furieusement cherché le klaxon pour signifier à cet oiseau de ligne son mécontentement, il se rendit compte qu’il n’y voyait plus rien. Peau de zob.

Et Henri planait en rond, à peu près aveugle et sans aucun espoir de retrouver ces foutus couillons. Mais désormais il lui fallait remettre la main sur ses binocles s’il voulait avoir un espoir  de survie dans ce monde ou les rongeurs le fuient et les avions de ligne le traquent.  

Dans un flou total, il parvient assez miraculeusement à se poser sur un arbre mort – entendons-nous bien, quand je dis « miraculeusement », ça veut dire qu’il s’est vautré une bonne douzaine de fois avant de réussir à remonter sur un vieux tronc moisi – et il commence à réaliser ce qui l’attend Les recherches vont être compliquées, à tâtons, dans ce désert. Il va jamais réussir à être rentré à l’heure pour le journal de 20h. Merde. En plus ce soir c’est Delahousse qui présente. Il aime bien Delahousse. Il a un peu des plumes lui aussi.

Un détail vient cependant titiller sa mémoire. Henri a pour habitude, lorsqu’il chasse, et avant de descendre en piqué sur une bande de couillons, de ranger ses lunettes dans sa poche une fois sa visée faite et juste avant de s’élancer, à ce moment-là, de toute façon, pour lui comme pour les rongeurs, tout est déjà décidé. Il se rappelle également qu’avant l’incident, il avait bel et bien rangé ses lunettes. Il s’agite alors, retourne ses poches, se secoue les plumes. Rien. Mince.

Ce n’était plus un accident. C’était du vol.

Et le vol, c’est mal.

« Au secours ! A l’attentat ! » il crie.

Enfin je vous le traduis hein, un peu au pif d’ailleurs. Il pourrait tout aussi bien être en train de faire des incantations pour invoquer l’esprit de Bernard Kouchner que j’en saurais pas mieux. A prendre avec des pincettes, donc.

Ceci étant dit, la prochaine fois que vous croisez un avion à lunettes. Méfiez-vous. Il va essayer de vous faire les poches. Vous êtes prévenus, c’est un vrai fumier.