Fiche technique
Girl in the Hallway est un documentaire animé canadien réalisé par Valérie Barnhart en 2018 relatant la disparition de Xiana Fairchild à Vallejo en 2016. Film expérimental entièrement dessiné par la réalisatrice elle-même sur un scénario de Jamie Dewolf, ce court-métrage « coup de poing » vaut le coup d’œil pour son originalité.
De quoi ça parle ?
Un père de famille d’une vingtaine d’années, ayant l’habitude de conter des histoires à sa fille, préfère ne jamais lui apprendre celle du Petit Chaperon Rouge car elle lui rappelle un événement qui l’a traumatisé.
En effet, après la description d’un tableau peu envieux de l’endroit dans lequel sa famille vivait – appartement social avec une sonnette cassée, un arrêt de bus austère à proximité, un voisinage inquiétant, du passage incessant – le narrateur nous rappelle la proximité de deux mondes : celui de sa famille, sécuritaire, à l’intérieur, face à celui de l’extérieur où tous les dangers sont présents. Tous les jours, le jeune couple protégeait leur bébé de l’agitation des autres, notamment celle d’une petite fille qui passait ses journées dans le hall de l’immeuble.
Le sourire édenté, les cheveux crasseux et tout juste âgée de sept ans, la fillette dessinait constamment sur les marches des escaliers et n’arrêtait pas de poser les mêmes questions : « comment s’appelle le bébé ? Est ce que je peux entrer jouer avec lui ? ». Tous les jours, elle n’arrivait pas à se souvenir du prénom et tous les jours, on lui fermait la porte au nez. Parfois, certains voisins lui donnaient à manger pour la faire taire mais personne ne l’invitait à entrer. Une routine à laquelle le père s’était habitué.
Un jour, exceptionnellement, notre narrateur lui prépara un repas chaud suite à l’insistance de la gamine. Comme toujours, après ça, on la renvoyait dans les escaliers. Il tenait à protéger sa famille et il ne connaissait pas cette fillette. Elle était devenue la plante verte du hall d’entrée.
Le lendemain, la plante verte disparut. Elle ne faisait plus partie de l’appartement. Au début, personne ne s’inquiétait. On supposait qu’elle était rentrée chez elle. Mais dès que le FBI intervint, ce fut une autre histoire…
L’histoire prend une tournure similaire à une enquête noire digne de l’ambiance de David Fincher. Une histoire horrible qui s’est réellement produite. Une histoire angoissante sublimée par l’esthétique du papier journal de la craie. Rappelons-le, il s’agit d’un documentaire de 10’35, entièrement story-boardé et dessiné par Valérie Barnhart. Premier film de sa filmographie, à découvrir au festival du court métrage 2020 à Clermont Ferrand ou sur Vimeo .
La force de ce court métrage
L’association du collage-montage, du journal et de la craie, donne une véritable identité au film et accentue la notion de fait divers. A travers ce court métrage, Valérie Barnhart nous rappelle notre individualité en tant qu’être humain. Nous sommes obsédés par le confort, par la surprotection de notre foyer et on ne songe pas à se soucier de notre voisin. On fait semblant de ne rien voir quand tout va mal chez l’autre. On relativise tout le temps. Le narrateur nous met dans cette situation, nous obligeant presque à ressentir de l’empathie pour cette fille qu’il n’a pas voulu laisser entrer. Normal quand les codes de conduite nous invitent à être prudents comme le Chaperon Rouge et à se méfier des inconnus…
Cependant, cette histoire nous apprend qu’on a tendance à voir le mal là où il ne faut pas, tandis que les loups de ces drames sont biens dissimulés. On ouvre régulièrement notre porte à des proches, des gens de passage… Et pourtant, on a tendance à placer notre confiance en certaines personnes, sans les connaitre, un peu trop souvent. Girl in the Hallway est un film qui nous pousse à faire plus attention à ce qui se passe dans notre hall d’escalier.